Les imprévus ou la magie de l'écriture

Comme je l'ai déjà écrit ailleurs sur ce blog, avant d'écrire un roman, j'en planifie la structure. Je ne commence jamais une histoire sans savoir, au moins dans les grandes lignes, comment elle se termine.
Autrefois, quand j'étais jeune et pleine d'illusions, je me lançais sans savoir où j'allais, et j'ai terminé une seule fois un roman entamé de cette façon. Au bout de six ans. Après avoir abandonné et repris plusieurs fois, et tout réécrit en cours de route. Bref, plus jamais ça.
Donc oui, au moment où je tapote la première phrase de telle ou telle nouvelle, de tel ou tel roman, je sais déjà à quoi ressemblera la dernière scène, et notamment, que X ou Y meurt avant la fin.

En ce moment, c'est le NaNoWriMo, période par excellence où de nombreux écrivains en herbe s'expriment sur les différents canaux mis à leur disposition : forum officiel, site des Wrimos français, salon de chat en direct, page et groupes Facebook. J'en vois quelques-uns qui expliquent qu'ils ne peuvent pas écrire une histoire qu'ils connaissent à l'avance, parce qu'ils y perdraient toute la magie de la découverte.
Je comprends tout à fait ce point de vue. J'ai sûrement pensé comme ça, à une époque.
Mais ça, c'était avant.
Avec l'expérience, j'ai découvert un phénomène tout à fait magique : même dans un cadre déjà posé, documenté et bien planté, il y a toujours des imprévus.

Certains auteurs diront "Mes personnages n'en font qu'à leur tête et ne veulent pas suivre mon plan". Je ne l'ai jamais ressenti ainsi : tout ce qui survient sous mon clavier, c'est moi qui le décide, à un instant T, en constatant que ce détail auquel je n'avais pas pensé irait bien dans la scène que je rédige. Ce n'est pas Léonie qui décide de prendre plus d'importance dans mon roman, mais bien moi qui apprécie la fraîcheur qu'elle apporte à l'intrigue, et estime qu'en lui accordant plus de place, j'améliore mon texte.

À titre d'exemple, voilà ce qui s'est passé ces derniers jours, dans mon NaNoWriMo du moment :

À ma droite, prenez Dérénik, personnage chouchou de certaines lectrices de L'Ouroboros d'argent, plein de vie, charmeur sans chercher à draguer, rien qu'en étant un joli garçon maladroit.

Mettez une perruque châtain clair à l'acteur Pierre Boulanger, et vous aurez une bonne approximation de Dérénik.

À ma gauche, prenez Ludy, qui vivote sans savoir si elle doit encore attendre quelque chose d'une existence artificiellement prolongée au-delà du raisonnable.

Mettez une perruque rousse frisée à l'actrice Gia Mantegna, et vous aurez une bonne approximation de Ludy.

Le scénario prévoyait de mettre les deux dans la même pièce, dans le cadre d'une discussion essentielle au déblocage d'un point crucial du deuxième acte.

Premier imprévu : sous mon clavier, Ludy s'est révélée tellement hors du monde et loin du présent qu'elle yoyotait par moments. Ça m'a fait bizarre.
Deuxième imprévu : la naïveté de Dérénik a réussi, non seulement à ramener un peu de vie dans ses neurones fatigués, mais aussi à la faire sourire franchement. Ça a fait du bien à tout le monde, moi incluse.


Et voilà. Sans remettre en cause les grandes lignes de mon plan, j'ai vu se dessiner un dialogue amusant et des possibilités de développement intéressantes.
 
Voilà pourquoi j'aime écrire, même en connaissant la fin à l'avance : il y a toujours des imprévus en cours de route. L'histoire est vivante, juste cadrée de façon à ne pas se perdre en route.

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