Le cas Célia

Avertissement : cette note peut contenir des spoilers sur L'Ouroboros d'argent, malgré mes précautions pour éviter de trop en dire.
En presque deux ans et demi de présence aux éditions du Chat Noir, L'Ouroboros d'argent est passé sous les yeux d'un lectorat varié, qui a parfois rédigé quelques retours. Les avis varient, ce qui est normal. On apprécie certains détails, d'autres non. Dérénik est le chouchou de certaines lectrices, tandis que d'autres le trouvent trop effacé et pas si intéressant.
En revanche, un point rassemble les lecteurs au-delà des divergences : tout le monde déteste Célia.

Célia de Rannetaud, après tout, est la méchante de l'histoire. Louve-garou de bonne famille, elle n'est clairement pas dans le besoin (ses vêtements et sa coiffure en témoignent aussi bien que le luxe manifeste de la demeure familiale), et elle maltraite les gentils héros sans se remettre en question. Aussi, malgré ses motivations bien réelles, nombreux sont les lecteurs qui avouent avoir eu envie de la secouer pour lui dire d'arrêter.
Ce qui est amusant, pourtant, c'est que je n'ai jamais souhaité la rendre détestable. Des personnages censés ne générer aucun attachement, j'en ai quelques-uns : des fourbes manipulateurs, des obsédés du contrôle, des mégalos finis...
Célia n'est rien de tout cela. En revanche, elle est sûre d'elle, du genre à avoir raison même quand elle a tort (un défaut assez courant dans la population générale)... et surtout, cette mission qu'elle part accomplir dans le roman, elle l'a attendue toute sa vie. Elle a été élevée dans l'idée d'une vengeance qu'on lui a refusée, et à défaut, elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour réparer ce qui fut brisé. Son obstination, sa volonté farouche d'aller au bout de sa démarche, fait d'elle une sorte de rouleau compresseur qui ignore les rappels à l'ordre et néglige les dommages collatéraux, jusqu'au dénouement qui... bon, on ne va pas spoiler la fin, non plus.
Bref, malgré tous ses défauts, je persiste à beaucoup aimer Célia.
Axel, lui continuera à la détester : malgré la trêve temporaire à la fin du roman, il ne peut pas la piffrer, une situation appelée à perdurer à peu près jusqu'à la fin de leurs vies respectives. Quant à Célia elle-même, elle n'est pas brutalement devenue digne des honneurs auxquels elle aspire : il lui reste un sacré chemin à parcourir. Rien ne garantit, d'ailleurs, qu'elle accèdera à la position qu'elle convoite.
Pourtant, dans d'autres circonstances, sa force, son sens de l'honneur, son caractère têtu et son verbe haut pourraient devenir des qualités. Il se trouve juste que, dans le contexte de L'Ouroboros d'argent, elle a tort et elle le paie (pas assez cher, m'a-t-on dit).
Si vous avez lu la nouvelle À nos espoirs, le personnage de Nolwenn ressemble beaucoup à Célia... or Nolwenn est dans une position d'héroïne. Une héroïne un brin agaçante avec sa méthode consistant à mettre les pieds dans le plat et à se comporter partout comme en terrain conquis, mais dans ce texte comme dans les autres (inédits) où elle apparaît, je la traite toujours comme un personnage positif.

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