NaNo 2013 [3]

On avance, on avance...

Plutôt pas mal, même.

Quatorze ans plus tard, les villages des Hauts saint-paulois comptaient toujours leur lot d’agitateurs, rendant indispensable une présence visible de l’armée coloniale. Lisha était consciente des risques encourus par son époux. Cependant, elle n’avait jamais vu la présence des Payet comme une menace supplémentaire.

« Que craignez-vous qu’il ne m’arrive ?

— Je ne sais pas. Le gouverneur Havelock lui-même a écrit à ton père pour lui dire que les retours des enfants de l’Étang se passaient bien, et qu’il veillerait à ta sécurité. Pourtant, je n’arrive pas à faire taire une inquiétude de mère, une sorte d’intuition : on t’a ôtée à cette famille pour ton bien. Tu ne devrais pas les fréquenter. »

La mâchoire de Martin n’était pas trop contractée. En revanche, ses sourcils froncés lui donnaient un regard dur, surtout avec l’éclairage qui frappait son visage par le côté. Marie-Ève, qui n’avait pas hérité de la délicate constitution de feue sa mère, était presque aussi grande que lui, mais il parvenait très bien à la regarder de haut. Il portait encore son costume de la journée, celui au veston gris perle, qui tombait de façon avantageuse sur un corps à peine empâté par rapport à celui qu’il avait arboré dans ses jeunes années. En clair, il venait de rentrer et de constater l’absence de sa nièce.

Il se passa la main sur la tête, ce qui eut pour effet de libérer des boucles brunes jusqu’alors bien coiffées en arrière.