En 2020, on n'en est plus à ça près, donc j'ouvre le tiroir.
La plupart des écrivains en ont quelques-uns sous le coude, des textes qui ne sont pas voués à paraître. Il s'agit le plus souvent d’œuvres de jeunesse : des histoires inachevées ou bancales, utiles pour se forger une plume mais qui n'ont pas leur place sous le regard des lecteurs. Chez moi, cet ensemble de fichiers bien cachés a un petit surnom : "Le tiroir des innommables".
Une pièce maîtresse de mon tiroir est la grande aventure de fantasy que j'ai voulu écrire au début des années 2000 sous le titre de Geste du prince Coriolan.
Qui parmi nous, dans sa jeunesse, n'a jamais rêvé de bâtir une immense fresque d'imaginaire comparable, dans l'échelle sinon dans le succès, à celle de Tolkien ?
Qui, parmi celleux d'entre nous qui ont tenté le coup, ne s'y est pas cassé les dents de fort belle manière ?
Et voilà comment des centaines de milliers de signes finissent rangés au rayon des souvenirs.
Voici de quoi ça cause :
Alors que la reine Mésange est mourante, son plus jeune enfant, le prince Coriolan, se pointe au palais de Flerrey alors qu'il a disparu depuis vingt ans. Il restera jusqu'aux obsèques de sa mère avant de repartir dans son nouveau chez-lui. En attendant, puisqu'on l'a sous la main, on lui fait écrire, pour les archives, ce qu'il a fichu pendant tout ce temps. L'ensemble n'a donc pas du tout la forme d'une geste. Et bien entendu, pépère a voyagé un peu partout, fort opportunément, pour montrer comme je me suis bien amusée à travailler le background.
Coriolan est prince d'Alaurie, un des deux royaumes-sœurs (avec l'Ioline) créés lors de la division de la Visolie quelques générations plus tôt. Le comté de Chazelat a profité de l'occasion pour prendre son indépendance et siège tranquillou entre la forêt et les montagnes. La plupart des Alauriens et des Iolinais vénèrent des esprits, censés vivre dans le monde des rêves sous le règne du Dieu Silencieux. L'existence de créatures magiques d'inspiration féérique les conforte dans cette croyance. L'une d'elles a d'ailleurs donné à la reine Mésange le pouvoir de communiquer avec des oiseaux, ce qui lui permet de garder un contact avec ses enfants même partis loin. Coriolan lui-même, "touché par les esprits", a parfois des visions de l'avenir dans ses rêves, mais les comprend rarement.
D'autres peuples ont des croyances différentes, mais celles-ci sont moins développées à l'exception d'une religion dans la dernière des quatre parties que j'ai écrites.
Exfiltré par sa mère qui sait qu'il n'aime pas la cour, Coriolan descend le fleuve Voile puis part vers le nord. Au passage, il embarque Myosotis, une jeune paysanne elle aussi touchée par les esprits. Tous deux franchissent la Vallée des Stèles, notoirement hantée, jusqu'aux "terres vierges" pas si vierges que ça puisqu'elles sont habitées par des clans semi-nomades. Le peuple de Dradem recueille, puis finit par carrément adopter ces deux adolescents perdus.
Coriolan et Myosotis, sa première copine
Néanmoins, Coriolan souhaite revoir sa sœur Elna mariée à l'héritier du royaume landrite, encore plus au nord. Il repart donc seul au printemps suivant, direction Matzar, son port, sa forteresse, ses négociants aux mœurs pas claires. Les Landrites ont un fonctionnement clanique : la couronne est actuellement dans le clan des Loups, mais pourrait passer dans le clan des Aigles. Quand Coriolan arrive sur place, Elna est enceinte jusqu'aux yeux (un premier enfant est mort en bas âge) mais on est sans nouvelles de son mari, le prince Trybnar.
Après la naissance, la présentation officielle de l'enfant ne pouvant avoir lieu sans son père, une expédition se monte pour aller le chercher. Coriolan est du voyage avec un couple d'aventuriers alauriens, un maître d'armes du clan des Loups et une princesse-sorcière du clan des Aigles. Le groupe retrouve et libère Trybnar réduit en esclavage, mais seulement après que Coriolan et la princesse Veline ont eux-mêmes passé quelques jours dans un camp de prisonniers.
De retour à Matzar, Coriolan commet une erreur de débutant : il veut prendre le bateau pour rendre visite à son autre sœur qui vit en Ioline. Bien entendu, comme on est dans une aventure de fantasy, il y a un grain, le bateau s'ancre à l'abri dans l'archipel des Roussettes mais se fait éperonner par un autre, le gamin est blessé et doit se soigner sur place. Il découvre ainsi la culture locale, ses fêtes, sa religion monothéiste, et se rapproche d'une prêtresse de son âge qui n'a pas encore confirmé ses vœux. Lila est malvoyante, aussi lui sert-il de guide lors de son épreuve finale.
Coriolan et Lila, sa deuxième copine
Dans la cinquième partie, il devait retrouver sa sœur et explorer l'Ioline, mais j'ai fini par lâcher ce projet trop long, trop bordélique ("vingt ans de la vie d'un homme", non, ce n'est pas une intrigue) et qui concentrait beaucoup trop de poncifs de la fantasy.
"Vous traitez le peuple de Dradem de barbares, mais ils ont un super sens de la solidarité, de la gnôle très bonne, des chansons géniales, et de toute façon, je suis l'un des leurs, tatouage à l'appui."
Bref, Coriolan, aux innommables avec ses bouclettes et son corbeau de compagnie.
Néanmoins, l'univers n'a pas été créé pour rien puisque j'y ai situé plusieurs nouvelles. Une seule est disponible à ce jour : Le pardon de Pella, qui reprend un des personnages de la troisième partie, bien des années plus tard. Et en plus elle est gratuite !
Les autres pourraient resurgir sous une forme ou sous une autre, à l'avenir.
Le Largater, pays où mon prince n'a pas eu l'occasion d'aller mais où se déroule la nouvelle En attendant Mrodo
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